Surprise me (Noclàs)

J’avais quand même du mal à croire tout ce qui m’étais arrivé ces derniers mois, et surtout que j’avais eu assez de courage pour stopper cet engrenage infernal. Mais les conséquences n’étaient pas négligeables, quand j’y repense. Je ne pouvais plus sortir de chez moi sans avoir une crise d’angoisse et devoir rentrer immédiatement dans mon appartement. Je ne sortais donc plus, me contentant, au prix de nombreuses vérifications, de m’ouvrir la porte aux livreurs, postiers et autres. Je m’étais coupé de tout, du monde extérieur. Les dégâts psychologiques étaient plus nombreux et surtout plus compliquer à guérir que les dégâts physiques. Cela faisait plus d’un mois que je n’avais pas travaillé, et je ne sais pas si je serais prêt à reprendre le travail de sitôt. Je voulais simplement reprendre une vie à peu près normale, mais, toute cette histoire m’en empêchait, quand bien même je n’ai désormais plus rien à craindre. Mais malheureusement ma peur me paralysait. Mais mon médecin avait décidé de me forcer de me bousculer un peu en me faisant reprendre le travail. Mais le problème c’est que j’étais professeur, et que donc, j’allais devoir être un minimum sociable, moi qui n’ai pas côtoyé les gens depuis un mois. Je n’osais même pas penser à ce qui peut se dire dans l’enceinte de l’université. Ca s’est probablement su, j’ai comme disparu de la circulation brutalement.

Mais, le pire c’est probablement Norio, cet étudiant avec qui j’ai, vraiment, apprécié passé du temps, au nez et à la barbe de Matthew, comme si je décidais encore de ma vie à ce moment-là. Je craignais son jugement, et surtout la déception, car il était notre voisin, et je n’ai jamais rien dit de mon quotidien, je trouvais toujours de quoi détourner la discussion sur autre chose que ma vie personnelle. Je soupire, ne vaut mieux pas y penser. J’ai probablement tout gâché. Même s’il n’y a strictement rien entre nous, à part de l’amitié ?

Voilà comment je suis en avance d’une demie heure à l’amphi. Tout est déjà prêt, et mon stress est au point culminant. Je ne la sens vraiment pas cette journée. Je sais que le doyen comprendrait si je prenais mes jambes à mon cou, mais, bordel, je devais me ressaisir et continuer de vivre, sinon je donnais raison à Matthew. Entendant la porte s’ouvrir, je sursaute brusquement, ce qui ne m’arrivait jamais, mais je suis tellement sur mes gardes actuellement que le moindre bruit suspect me fait sursauter.

Je n’ai pas vraiment envie de retrouver mes habitudes, ça m’effraie plus que je ne le pense. Et le chemin pour aller à l’université me paraît plus long, même s’il n’a pas changé depuis la dernière fois. Mais c’est certainement parce que je suis plus sur mon qui-vive. Mais je devais surpasser mes peurs et recommencer à vivre normalement. Je sais que je ne crains plus rien, que mon ex n’a désormais plus aucun le droit de m’approcher. Pourtant je reste persuadé qu’il peut m’approcher s’il en a décidé. Et c’est ce que je crains le plus. Parce que je ne sais pas si je saurais lui résister vraiment, ne pas retomber entre ses griffes. Je ne suis pas parfaitement rétabli pour supporter encore son harcèlement. Mais je ne pouvais pas laisser Matthew prendre le pas sur ma vie, et reprendre une vie normale c’était lui donner tort et lui montrer qu’il ne m’atteignait plus, que je ne suis plus sa marionnette. Et puis je devais arrêter de l’isoler, aussi, ce serait une bonne chose si je veux continuer à avoir une vie sociale. Matthew avait réussi à long terme à me couper de tous ceux que je connaissais. Et surtout de mon voisin, Norio, vers la fin, il avait compris que je ressentais des choses pour lui et donc cela avait augmenter son degré de violence. Il ne s’était plus retenu de me frapper au visage cette fois-ci. La dernière fois il aurait pu me défigurer, s’il avait tenu ses menaces. C’est ce qui m’avait poussé à fuir la maison, par tout les moyens. Maintenant le cauchemar est fini, mais j’ai encore l’impression que je suis dedans. A l’heure d’aujourd’hui, je pouvais reprendre une vie normale en attendant le jugement. Pourtant la peur peut me faire faire beaucoup de chose. Et je ne suis pas si confiant que je laisse paraître dans cet amphi. J’étais tranquillement installé, préparant le prochain cours. Même si je craignais mon retour, je dois bien avouer qu’enseigner me manquait.

Et puis tu étais là. Tu étais probablement le seul à t’être réellement inquiété de mon sort, sans même savoir ce qui se passait. Mais tu avais essayé de me joindre, de venir me rendre visite. Et tu faisais à chaque fois face à une porte close. Je n’avais pas la force de t’ouvrir et, en plus si là je n’ai pas la grande forme, c’était encore pire avant. Je ne voulais pas que tu vois mes bleus. Maintenant, je devais simplement me requinquer. Et peut-être paraître plus ouvert. Pourtant, je sais que je ne crains rien en ta présence, mais j’avais tiré un trait sur mon passé, et tu en faisais en quelque sorte partie, même si ce ne sont pas de mauvais souvenirs. Je croise les bras sur mon torse, geste de défense parce que tu me fixes un peu trop. Un raclement de gorge plus tard, je hausse les épaules « il le faut bien… » j’étais plus bavard, mais ça, c’était avant. Je secoue la tête « Tu ne m’as pas dérangé, mais je ne pouvais pas vraiment répondre, je n’étais pas très… présentable. Mais je vais mieux, enfin du mieux que je peux aller. » [Je préfère rester évasif sur le sujet, certain que tu culpabiliseras de ne rien avoir vu. Et je déteste que l’on me prenne en pitié. C’est à moi de gérer tout ça, pas les autres.