Trapped... [RP ALEATOIRE]

Aujourd’hui, c’était le grand jour. Du moins, je l’espérais. J’avais rendez-vous avec mon médecin à l’hôpital, et j’allais savoir, si oui ou non, je pouvais enfin me débarrasser de ces satanés béquilles qui m’empoisonnaient la vie. J’avais donc fait annuler tous les rendez-vous professionnels de la journée et – à cause de ces foutus transports en communs que je ne supportais plus – je partis de chez moi avec deux heures d’avance. Ne sait-on jamais. Fallait toujours être prévoyant. Et en effet, arrivant à destination, j’avais encore trois quart d’heure devant moi à tuer. Si pas plus. C’est bien connu que les médecins ne sont jamais à l’heure. L’hôpital étant non-fumeur – un peu comme tout établissement public – je profitais donc de m’en griller une dehors, prenant tout mon temps. Une fois fait, je me dirigeais tout naturellement vers la cafétéria, enchaînant café sur café. Ce n’était pas tout à fait vrai, mais il fallait bien que je m’occupe. Quinze minutes avant l’heure du rendez-vous, je bougeais finalement mes fesses vers la réception, pour qu’elles puissent faire l’admission, avant de me diriger vers les ascenseurs. Une jeune femme était déjà là, et dès qu’il arriva, elle s’engouffra avant moi et je la suivis. Je lui souris hochant la tête pour simple signe de salutation, et, par réflexe, je me postais dans un coin, regardant droit devant moi.

L’ascenseur se mit en route dès les portes fermées. D’habitude, je préférais prendre les escaliers, mais là, avec mes cannes, je n’avais pas le choix. Quoique, même pour chez moi je prenais l’ascenseur. De ce fait, j’essayais de me vider la tête, faire comme si j’oubliais tout ce qui m’entourait en me disant qu’en moins de deux je serais à mon étage. Un bruit étrange se fit entendre, et après un mouvement saccadé de l’ascenseur, il s’arrêta. Je revins à la réalité. Ou plutôt dans mon pire cauchemar, et ma main se crispa sur la poignée de ma béquille. Sans le savoir, je devins livide en quelques secondes et j’entendis à peine la jeune femme à mes côtés se plaindre. Je déglutis, fermant les yeux, avant de prendre une grande inspiration. Je me décollai de la paroi, poussais sans ménagement la jeune femme, et je me mis à taper frénétiquement sur tous les boutons. Sans succès. J’étais à deux doigts de taper dans le tableau de bord quand je me suis dit que ce n’était peut-être pas une bonne idée. Je me tournais vers elle, sentant déjà la transpiration se forme au niveau de mon front. « Qu’est … qu’est-ce qu’il … se passe ? » demandais-je d’une voix tremblotante. Ce n’était pas très moi – déjà, merci mon dieu d’avoir réussi à retenir un cri pas très viril – et j’étais content de ne pas me retrouver avec d’autres personnes.  Avant de me diriger vers les portes, tambourinant avec mes deux poings. « A L’AIDEEEE ! NOUS SOMMES BLOQUES ! AU SECOURS ! » Je devenais littéralement fou. Théodore qui perdait de toute sa superbe. Heureusement - si on peut le dire - les lumières étaient encore - pour l'instant - allumées.

Je sentais que la panique était en train de grimper graduellement. Il fallait que je reste calme, mais c’était chose impossible. J’étais à deux doigts d’hyper ventiler. Maudite claustrophobie. Et surtout foutues béquilles ! Sans elles, je ne me retrouverais pas enfermé dans un ascenseur. Je serais loin d’ici, à faire je ne sais quoi. Mieux vaut pas y penser, avant que je me mette à pleurer pour de bon. Je pris une inspiration après m’être excité sur ces pauvres boutons, et je me laissai tomber, en boule, dans un coin. Le visage enfoui dans mes mains. Respire, expire, respire, expire. Je levai finalement la tête, regardant toutefois droit devant moi. Pour finalement me tourner vers elle, un sourire mauvais accroché à mon visage. La pauvre, elle n’avait vraiment pas de chance. Déjà être bloquée, et en plus avec moi. Et déjà que je n’étais pas toujours d’une très agréable compagnie, quand j’étais en complète panique, c’était bien pire. « Je n’avais pas remarqué, tiens. Merci pour votre déduction, Derrick », ricanais-je.

Je la regardais ensuite appuyé sur le bouton d’urgence, espérant de toutes mes forces que quelqu’un allait bien répondre. Apparemment non. Il y a juste eu un cliquetis étrange puis plus rien. Je ramenais mes jambes vers mon corps, les entourant de mes mains, comme un enfant. Ce que j’étais d’ailleurs revenu. Tous les souvenirs refaisant surface d’un coup. Surtout ceux de ma mère, qui, pour me punir, sans aucune explication, m’enfermait pendant des heures dans un placard, sans lumière. Un frisson parcourut tout mon corps, et je posais ensuite mon regard sur la jeune femme, qui elle, contrairement à moi, arrivait à garder son sang-froid. Je déglutis. « Vous … vous croyez qu’on va nous sortir de là ? », les mots étaient sortis comme un murmure, alors que ma voix tremblait. « Je veux dire … rapidement ? » Je ne supportais pas cette situation. Je ne pouvais pas rêver situation plus angoissante. Il fallait que je … je ne savais pas. Je n’arrivais pas à penser à autre chose. J’avais juste envie de sortir de là. De ces quatre murs qui m’oppressaient de plus en plus. Puis, une idée lumineuse me transperça de toute part. Mon téléphone ! Je le sortis de la poche. Une barre. Avec un peu de chance, il nous était possible de contacter l’extérieur. Je le lui tendis « Vous … vous pouvez le faire à ma place ? Je … » les mots restèrent bloqués dans ma gorge, déjà trop honteux par mon comportement.  

L’air se faisait rare dans mes poumons. La pièce rapetissait à vue d’œil, les parois se rapprochant de plus en plus. Je me mis à haleter. Transpirant. Même le fait de fermer les yeux, n’y changeais rien. Si je ne pouvais pas sortir d’ici dans les cinq minutes suivantes, je n’aurais plus aucun contrôle. Un rictus moqueur s’afficha sur mes lèvres quand elle annonça que dans un hôpital, les ascenseurs ne restaient pas souvent en panne sans que ça se remarque. Je le savais bien, merci ! Alors, bon sang ! que foutaient-ils ? J’avais l’impression d’être coincé dans ces quatre murs depuis une bonne heure déjà – ce qui n’était pas le cas – et toujours aucun secours à l’horizon. Je savais bien que la jeune femme bloquée avec moi essayait juste de me rassurer. Ainsi donc, je ne fis aucun commentaire, comme j’en avais l’habitude. Et, faut bien le dire, se mettre à dos la personne avec laquelle on est bloqué, n’est pas une si bonne idée. Surtout si l’idée d’assommer quelqu’un lui viendrait. Quoique, au moins, dans les vapes, je ne serais plus conscience de ce qui se passait autour de moi. Je lui tendis mon téléphone, n’ayant plus les capacités pour composer un numéro moi-même, et devant son hésitation, je fermais les yeux, inspirant intensément, avant de parler. « Composez le 911. Ou n’importe quel contact, tant qu’ils nous apportent de l’aide ». Je ne pourrais pas dire si oui ou non elle avait suivi mon conseil. Je m’étais replié sur moi-même, les yeux fermés, laissant mes pensées vagabonder à l’air libre. Loin de tout ça. Je sombrais. Petit à petit. Toujours en manque d’air. Haletant. Seul ma respiration venait interrompre le silence.

Un bruit. Un BOUM me fit revenir à moi. Tout à coup, je me souviens d’où j’étais, et la panique me regagna, comme une ancienne amie. Toutefois, contrairement à tout à l’heure, j’entendais des voix, du mouvement, tout autour de nous. Était-ce possible ? Mes oreilles captaient des bribes par-ci, par-là, mais sans vraiment comprendre le sens. Je nageais en plein délire. Tant bien que mal, et surtout en me tenant, je me relevai, posant mon regard fiévreux sur ma compagne d’infortune. « Je suis en train d’halluciner, c’est ça ? », demandais-je, la voix pâteuse. Je dus me retenir de ne pas m’accrocher à son cou, à la secouer, pour qu’elle me réponde. Comme à une bouée de sauvetage.