Help ! {ELIZABETH & TALLULAH}

Ce matin-là, ma garde robe m'avait lancé un appel à la nouveauté. Après avoir essayé de multiples vêtements, je me rendais compte que le dernier en date avait été acheté presque deux ans auparavant. Moi qui adorais faire du lèche-vitrine, le travail et le manque de temps m'avait presque fait oublier sa définition, de même que celle du shopping. Non, la seule chose que j'achetais de façon régulière nécessitait un besoin vital puisqu'il s'agissait des courses hebdomadaires que je remplissais dans mon frigo et mes placards.
J'avais si peu acheté que j'en avais presque oublié les endroits où trouver des vêtements des nouvelles collections. Toutefois peu forte de leur prix, j'avais l'habitudes de m'habiller un peu partout, sans préférence. C'est donc vers la friperie des quartiers Ouest que j'avais décidé de prendre la route. Je savais, d'expérience, que, pour une friperie, les vêtements exposés étaient plutôt de qualité.
En rentrant dans ladite friperie, j'avais commencé à fouiller, un peu dans tous les sens, avant de me diriger vers le fond de la boutique. Rapidement, j'étais tombée sur de nombreux vêtements qui me faisaient rêver. J'avais commencé à mettre un certain nombre de mes trouvailles dans un panier pour me décider. Une robe à la main, je m'approchais d'une femme qui se tenait à côté de moi, soit farfouillant, soit rangeant. Prenant alors le risque qu'elle ne travaille pas ici, je lui montrais la robe et lui demandais. « Bonjour! Excusez-moi, pourriez-vous m'indiquer le prix de la robe? Il n'y a pas d'étiquette... »

J’avais un peu abusé de shopping ces derniers temps. Ces trois derniers mois même. En même temps depuis le divorce, je n’avais rien de mieux à faire : personne ne m’attendait à la maison. Même la maison était toute nouvelle… Sauf que mon portefeuille commençait à peser léger… et j’avais une tonne de vêtements en très bon état que je ne portais plus. Je décidai donc de passer à la friperie, histoire de les échanger contre un peu d’argent, ça ne ferait aucun mal. J’avais pu obtenir une somme assez conséquente, il faut dire que j’en avais ramené vraiment beaucoup des vêtements. Mais les autres, ceux qui étaient en vente, semblait m’appeler, demandant de les sauver de l’abandon et de l’oubli. Dit comme ça, ça faisait un peu dramatique. Mais j’étais une accro du shopping, pas de ma faute.
Vous l’auriez compris, je ne pus m’empêcher de fureter dans la friperie à la recherche de quelques pièces pas trop démodées et surtout de probables coups de cœur. Au moins, les vêtements ici ne me coûteraient pas une fortune comme au centre commercial à Union Square ; un maigre prétexte pour céder à la tentation je l’avoue. J’étais d’ailleurs très concentrée dans ma recherche du bonheur vestimentaire quand quelqu’un sembla m’adresser la parole. Je dis bien « sembla » puisqu’elle me demandait le prix de la robe qu’elle avait à la main. Je me retournai, histoire de voir qu’il n’y avait personne d’autre. Personne. C’était qu’elle me parlait vraiment à moi. « Bonjour. » commençai-je par répondre avant d’afficher un sourire amusée et de reprendre la parole. « Il faudrait peut-être plutôt demander à une vendeuse pour le prix. » Je rigolai légèrement en la voyant un peu confuse. « Pas que je ne veuille pas aider mais ce n’est pas dans mes cordes. » Un sourire encore plus grand se dessina sur mes lèvres. « Mais je suis certaine que c’est très abordable comme toujours par ici. » finis-je par dire en reprenant mon sérieux.

L'espace d'un instant, je fus très mal à l'aise en la voyant agir. Je m'adressais bien à elle, et pourtant, je la voyais regarder furtivement autour d'elle. Il ne m'en fallut pas plus pour me rendre compte que, soit je m'étais adressée à la mauvaise vendeuse, soit cette jolie brune n'était pas une vendeuse du tout. Ma robe à la main, levée, je ne tardais donc pas à la baisser. Dommage, parce qu'elle était vraiment splendide et, si je n'avais pas été moi, je l'aurais probablement trimbalée dans tout le magasin pour la montrer à toutes celles que j'aurais pu faire baver de jalousie. Sauf que j'étais moi, et je n'étais pas comme ça, tout simplement.

Son sourire, je le lui rendis immédiatement. Un automatisme qui m'avait vue grandir et que j'appelais politesse, même si mes parents ne le voyaient pas du tout comme ça, eux qui appelaient plutôt mon habitude par de l'hypocrisie. Tu parles, oui!
Je ne savais plus vraiment où me mettre. Elle avait en quelques mots seulement confirmé tous mes soupçons. Je m'en voulais un peu de l'avoir ainsi confondue avec une vendeuse, mais son attitude, bien différente de celle que pourrait avoir quelqu'un que l'on a pris par mégarde pour quelqu'un d'autre, me soulageait un peu malgré tout. Elle était souriante, et pour quelqu'un de maladroit comme moi, ça faisait du bien de se dire que ce n'était pas une troisième guerre mondiale que l'on venait de déclencher. « Oh... » fis-je simplement, mon sourire revenant peu à peu. « Je vous remercie en tout cas ! » Abordable? Tu veux rire! C'était carrément mille fois mieux. On pouvait trouver des vêtements à la mode, des marques délaissées parce qu'elles ne faisaient plus partie de la dernière collection, le tout pour quelques ridicules dollars. « C'est vrai, ça n'est pas cher du tout ici! Heureusement, en un sens, d'ailleurs! » Bon je n'étais clairement pas la personne à plaindre dans tous les cas, puisque même en étant en froid avec mes parents, entre mon métier et mon héritage qu'ils me laissaient ouvert dès à présent, j'étais largement couverte par le besoin, c'était sans dire.

Je me sentis un peu mal après coup d’avoir affiché ce sourire amusé face à sa confusion. Après tout il pouvait très bien prêter à confusion et être interprété comme un sourire moqueur. Me moquer de mon interlocutrice n’était pas mon intention, mais pas du tout. Si je la connaissais, peut-être que je me serais pas gênée pour me moquer mais si on se connaissait elle n’aurait jamais pu me méprendre pour une vendeuse non plus. Logique, non ? Cependant, je fus très vite rassurée en la voyant elle-même sourire tandis qu’elle me remerciait quand même. « Ce n’est rien. Je n’ai même pas pu t’aider en plus. » rajoutai-je avant d’enchaîner sur la très forte probabilité que la robe soit à un prix plus que raisonnable. Nous étions dans une friperie après tout : par définition, une friperie ne vendait-il pas ces produits à bas prix ? Ce type de commerce de détail était très connu et populaire pour cette raison – en plus de celle de trouver des articles vintage très rares, très beaux, et très bon marché ! Mon interlocutrice partageait mon opinion ; « heureusement » avait-elle-même enchéri. « C’est à peine si je regarde les prix quand je viens ici ! » Bon, je ne venais pas souvent, l’appel de la nouveauté était beaucoup trop fort chez moi généralement. On pouvait presque me considérer comme une grande amatrice de mode à l’affût des nouvelles tendances et donc des nouvelles collections. Si j’étais beaucoup plus riche que ça, il était certain que j’aurais aidé les grandes maisons de mode à agrandir leur fortune aux dépens de la mienne. Je le savais bien ; comment croyez-vous que j’avais l’habitude de dépenser l’argent de mon mari ? Ex-mari plutôt.   « Il est rare de pouvoir trouver son bonheur sans dépenser une somme astronomique. » Je jetai un rapide coup d’œil à la robe qu’elle avait tendu il y a quelques instants à peine. « Et cette robe est la définition même du bonheur vestimentaire. » Ma façon à moi de dire à quel point je la trouvais magnifique. Si je n’en avais pas déjà eu une qui avait une coupe quasiment identique, sûrement que je me serais battue pour l’avoir.

J'étais vraiment une empotée. Comme tout le monde, j'avais mon lot de maladresses, mais celle là, c'était une première chez moi, sans pour autant que ce soit si étonnant. Qui d'autre dans mon entourage aurait pu réaliser une telle confusion? Une chance que la jeune femme face à moi n'ait pas eu l'air de m'en tenir rigueur. Au moins, je ne passais pas pour la dingue de service qui s'adressait à n'importe qui n'importe quand.  « Ca n'est pas grave, ne t'en fais pas! » C'était vrai, à près tout, c'était moi qui étais en faute et non pas elle, si on réfléchissait un peu plus loin que prévu.


J'étais toujours contente d'être là, parce que même si les prix étaient, comme le disait mon interlocutrice, hyper abordables, il fallait avouer que certaines trouvailles étaient plus que magnifiques et extrêmement à la mode.


Je souris devant la réflexion de la brune face à moi. « C'est pas étonnant, il suffit de voir tout ce qu'il faut acheter pour en avoir pour cher... » C'était vrai d'ailleurs...  Mais ce n'était pas comme si je regardais forcément mes dépenses, en même temps. Alors, oui et non. Les sommes astronomiques, comme elle disait si bien, ça me passait complètement au dessus de la tête. « Pas faux! Mais en même temps tout dépend le prix qu'on est d'accord de mettre... enfin, je suppose. » Je laissais échapper un petit rire en regardant un peu plus ma future nouvelle robe. Il n'y avait pas à dire elle avait complètement raison!

La brune m’avait méprise pour une vendeuse et m’avait adressé la parole. Et mon petit doigt me disait que la conversation allait se faire bon train. J’avais comme un pressentiment. Et ce ne serait pas la première fois que je rentre dans une grande conversation avec une totale inconnue pendant que je faisais mes emplettes. Comment je pouvais connaître autant de gens sinon vous croyez ? Puis, j’aimais bien aller vers les gens. Je me trouvais d’ailleurs stupide de ne pas toujours avoir été comme ça. Quand j’étais très jeune, je me renfermais dans mon carnet de dessins… Mais j’avais radicalement changé après le déménagement. Emménager à San Francisco avait été un nouveau départ. Si Elizabeth Saunders avait officiellement vu le jour un 13 décembre 1986, Lizzie elle n’était apparue qu’en l’an 2000 suite à notre installation. Et Lizzie, elle, était capable de parler de vêtements pendant des heures. Pendant un temps, j’en dessinais même, avant de tomber amoureuse de l’architecture. Mais j’étais restée une fille plutôt coquette et amatrice de mode quand même… Bref. Là où je voulais en venir c’était que je risquais de faire durée la discussion. Elle n’était pas très passionnée mais me connaissant, ça ne saurait tarder.
Pour l’instant nous n’étions qu’au balbutiement de notre rencontre et nous évoquions la bonne affaire que c’était de fréquenter les friperies. Les comptes en banque en poussaient des soupirs de soulagement. Mais comme elle le disait, on pouvait être amené à dépenser beaucoup quand même, en dévalisant l’établissement. « Il faut vraiment avoir de la chance pour trouver autant de vêtements qui convienne quand même. Parce que souvent, il y a quelque chose qui ne va pas, le coloris, la taille, le manque de stock… » Bah oui ! Très souvent quand on pensait pouvoir acheter cette belle perle rare, il y avait ce quelque chose qui empêchait finalement son achat. Et alors on était un peu triste. Du moins moi je l’étais toujours dans ces moments là. Mais bon sang ça valait le coup pour quand on trouvait notre « bonheur vestimentaire » comme j’aimais à l’appeler. Et elle elle l’avait trouvé. Elle ne disait d’ailleurs pas le contraire. Mais elle relativisait aussi, supposant que tout demandait de la somme qu’on acceptait de dépenser. « Il est certain que c’est un point tout à fait relatif selon les personnes et leur situation financière. » Je hochais la tête en même temps. « Mais il arrive souvent à tout le monde de ne pas trop se montrer raisonnable et d’acheter cette belle chose tant convoitée mais si chère… » Je parlais de vécu. Pendant mes quatre ans de mariage, ça n’avait pas été un réel souci par contre, l’avantage d’avoir un mari à la situation financière aisée. Par conséquent, je surveillais maintenant mes dépenses : je n’étais qu’une architecte salariée dans une agence assez importante dieu merci ! Mon regard se reportant de nouveau sur la robe, j’en revenais à son sujet. « Dommage qu’il y ait parfois des défauts qui passent à la trappe même si les vêtements sont normalement plutôt bien choisis pour ici… J’espère que tu t’es assurée que tout allait bien avec la robe. Ce serait bête d’être déçue. »

J'aurais pu m'en vouloir des siècles et des siècles, mais elle n'avait pas l'air rancunière alors, rapidement, je passais à autre chose.
C'était vrai que cette robe était une trouvaille magnifique. J'étais drôlement fière de moi en la voyant. J'allais pouvoir montrer mes grandes jambes avec, et je n'en étais pas peu fière, bien au contraire!
Heureusement que je n'étais pas la même que ma cousine. Elle, elle était plutôt du genre à rester timide, ne parler à personne quand elle faisait quoi que ce soit, et à se terrer dans un coin quand elle faisait une boulette comme la mienne. Moi, là, de suite, j'étais bien contente d'avoir une maladresse innée pour me méprendre. Bon, ça n'était pas non plus le top du top, surtout pour elle, et surtout en fonction de la personne qu'on avait en face, mais voilà.
Je souris. C'était vrai, il fallait avoir de la chance, mais parfois, certaines en avaient bien plus que nécessaire. « C'est sûr, mais j'en ai vu. Bon, c'était généralement des femmes qui vous bousculaient pour pouvoir avoir ce sur quoi vous alliez poser la main, mais j'en ai vu. Et le prix était vraiment hallucinant. » Oui parce que pour en arriver à cinq chiffres dans un tel endroit, c'était vraiment hallucinant.
Elle avait vraiment l'air d'avoir vécu ses paroles et je n'étais pas certaine de savoir si c'était triste ou à hurler de rire. Alors je me contentais d'afficher une moue partagée et de hausser les épaules. Au moins je ne la vexerai pas avec des réactions inattendues et inappropriées.
Réaction subite. Quoi? Des défauts. Je tournais alors la robe vers moi pour pouvoir la regarder. « Des défauts? Où ça? » À mes yeux elle était parfaite. Pile la bonne longueur, la bonne forme, la bonne couleur. Les bons motifs. Bref, la perfection la plus complète. Et jusque là je n'avais jamais été déçue non plus, alors où avait-elle vu des défauts?! « Je suis certaine que je ne serai pas déçue. » Puis quand bien même, elle finirait dans le sac à donner à l'Eglise de mon quartier et je reviendrai acheter encore et encore. Même si je n'étais pas bien payée. Après tout, sans pouvoir compter sur eux, je savais compter sur l'argent de mes parents.

Je n’étais pas loin du fou rire lorsque mon interlocutrice mentionna avoir déjà vu des femmes qui étaient prêtes à bousculer rien que pour avoir des vêtements par ici. A s’imaginer la scène, c’était vraiment très très marrant. Je me disais même que, si jamais ça m’arriverait que quelqu’un me prenne ainsi le bien convoité, je serais très capable de rendre la pareille à la personne en faute. Je restais polie généralement mais il ne fallait pas non plus me chercher, je me défends toujours. Sauf quand je m’aperçois que ça n’en vaut pas la peine. Mais dans des circonstances pareilles, quand on connaît mon amour pour le shopping et les jolies choses, il était clair que je serais sans pitié. Tant pis. « Haha j’aurais tellement voulu voir ça. » commentai-je, pendant que je reprenais mon souffle. Dire que je ne savais pas à ce moment là que je me bagarrerai au centre commercial pour une jolie paire de chaussures quelques jours plus tard.
A mon tour, j’évoquais très implicitement une anecdote, celle de dépenser une fortune quand il ne le fallait vraiment pas. Cela m’était arrivé plus d’une seule fois mais j’avais en tête un jour en particulier où j’avais craqué pour cette robe de haute-couture… Si les circonstances n’avaient pas fait que je me mettrais en couple avec un homme quand même assez riche, sûrement que je l’aurais bien sentie passer au niveau de mon compte en banque… Il fallait l’avouer, j’avais été veinarde sur ce coup-là. Toutefois, la conversation ne se centra pas là-dessus et on passait à autre chose. Enfin façon de parler vu qu’on continuait à parlait des fringues de la friperie. Et je parlais des éventuels défauts qu’il pouvait y avoir avec les vêtements parfois. La réaction fut immédiate de la part de la brune ; elle jeta un rapide coup d’œil à la robe, à leur recherche, avant de déclarer sur un ton ferme et confiant qu’elle ne serait pas déçue. J’éclatai de rire parce que je l’avais bien trouvé marrante sur ce coup là. « Je n’ai jamais dit que cette robe là en particulier avait un défaut. Il ne faut pas s’affoler comme ça voyons ! » Et j’éclatai encore de rire. « En tous cas pas besoin d’être observatrice pour voir qu’il s’agit d’un coup de cœur. Je me demande bien ce que tu fais encore ici à parler à une totale inconnue au lieu de la payer en caisse. Tu en es folle dingue. » En tous cas, moi à sa place, la robe serait déjà en ma possession ; je n’aurais pas perdu autant de temps. « Surtout que finalement cette conversation sonne presque inutile puisque je n’ai pas été en mesure de t’aider. » ajoutai-je. J’étais alors toujours un peu hilare.

La brune en face de moi ne semblait pas me prendre au sérieux quand j'affirmais que certaines femmes se battaient ici pour des vêtements. Ce qu'il fallait dire c'est que bon nombre d'entre eux étaient en exemplaire unique puisque, souvent, c'étaient des vêtements donnés par un particulier. C'était pour cette raison qu'on en trouvait de toutes les modes et de tous les genres. Pourtant, derrière son sourire qui me paraissait presque moqueur, j'étais sûre qu'elle s'imaginait déjà dans cette situation et que ça ne lui semblait pas invraisemblable que ça. Après tout, pour ce prix, autant se battre pour une perle rare et aller acheter des Gucci par derrière face à l'économie que l'on pouvait faire dans cette friperie.« J'ai vu, personnellement, et je suis bien contente d'être encore en vie après ça! » J'exagérais, certes, mais presque pas, il fallait le dire!

Aussitôt mon interlocutrice me parlant de défauts de couture, aussitôt je m'inquiétais pour cette magnifique robe sous mes yeux. Quoi quoi? imparfaite? Déjà, je me voyais devoir renoncer à ma belle trouvaille. Quel dommage! Son rire me fit sérieusement penser que je n'aurais pas dû faire carrière en tant qu'interprète en langue des signes, mais en tant que comique. Peut-être également en langue des signes, il fallait encore voir ce dont j'étais capable ou pas niveau humour, mais apparemment mes réactions valaient des rires et, j'osais espérais, au moins des applaudissements délirants d'une foule invisible. Ou pas. « Au temps pour moi! » M'excusai-je, le feu me montant aux joues. Je souris, sur un petit nuage.  « Effectivement, un vrai coup de coeur! » J'éclatais de rire. « Ca c'est parce que je suis une folle dingue! »
Je lui adressais, contre ses paroles, un regard toutefois très reconnaissant. « Bon, allez, je vais payer cette robe! Est-ce que par hasard, je peux t'inviter à boire un café? » C'était très bateau, mais après tout, pourquoi ne pas continuer cette discussion très intéressante, bien qu'elle ne nous menait pas à apprendre quoi que ce soit sur ce que nous achetions.

Je secouai la tête pour enlever la présente image que j’avais en tête suite au récit et aux commentaires de la petite brunette. A l’entendre, on aurait pu croire qu’elle était une survivante… Du coup, je m’imaginais une bande d’hystériques qui s’arrachaient les cheveux d’une main, menaçant ses rivales avec un parfum de l’autre – parce que clairement ça brûlerait énormément si jamais quelqu’un vous en aspergerait dans les yeux – pour une simple robe ou autre. Ce serait clairement une scène très drôle dans un film comique… « Il faut toujours laisser un survivant qui puisse raconter l’histoire… » conclus-je, accompagnant mes paroles d’un petit clin d’œil complice. Je le savais bien qu’elle exagérait en fait mais autant jouer le jeu ; c’en était plus amusant.
On en revenait très vite au sujet précurseur de notre petite conversation : cette robe qu’elle aimait tant et dont nous ignorions toujours le prix. Nous étions à ce stade toutes les deux sujet à une certaine hilarité. Elle n’aidait pas en reprenant mes mos pour affirmer qu’elle était folle dingue avec un humour tout aussi certain. « Je veux bien te croire si tu le dis. Je te connais pas pour ‘affirme et je n’aurais jamais osé le faire. » Je levai la main, comme en signe d’allégeance. « Je le jure. » Il n’aurait plus manqué qu’une bible – ce qui aurait été très ironique lorsqu’on connaissant mon cruel manque de foi que me reprochait ma famille de cathos… - et ça aurait été uns très bonne parodie d’une scène de procès.
Même si je n’avais pas été en mesure de l’aider, mon interlocutrice se montra reconnaissante – du moins, pouvais-lire lire quelque chose qui ressemblait à de la reconnaissance dans ses prunelles brunes – et elle m’invita étonnamment à boire un café. Prise de court, je n’étais pas loin de bredouiller ma réponse. « Mais oui… Pourquoi pas ? Ce serait avec grand plaisir. » arrivai-je à lui répondre. Après tout, le courant semblait très bien passé entre nous deux. « Moi c’est Elizabeth au fait. Mais je préfère qu’on m’appelle Lizzie. » Je venais tout juste de me rendre compte qu’il était peut-être le moment de se présenter alors. « Tu ne l’as pas demandé mais je me dis qu’il serait plus plaisant de se présenter avant ça. » J’affichai un large sourire.